Un fait divers survenu à Thiès relance une inquiétude croissante dans nos villes : l’insécurité urbaine, mais surtout, la montée de la justice populaire. Dans le quartier de Mbour 1, un homme a été violemment lynché par des riverains après avoir participé, avec deux complices armés de coupe-coupe, à une agression visant un passant. Le trio a dérobé une sacoche contenant 43 500 F CFA. Si l’un d’eux a été arrêté sur place, ce n’est pas par la police mais par une foule en colère, bien décidée à se faire justice elle-même. Ce déchaînement de violence interroge : sommes-nous en train de remplacer l’État de droit par la loi du talion ?
La criminalité urbaine, notamment dans des centres comme Thiès, inquiète légitimement les populations. Agressions, vols à main armée et cambriolages sont devenus des réalités quasi quotidiennes. Devant ce sentiment d’abandon ou d’inefficacité des forces de l’ordre, certains citoyens choisissent de prendre en main leur propre sécurité. C’est dans ce contexte de tension, de peur et de frustration que surgissent des réactions incontrôlées, violentes, et profondément dangereuses.
L’émotion suscitée par ces actes criminels est compréhensible. Personne ne souhaite vivre dans une ville où il faut craindre pour sa vie ou ses biens. Mais il est inacceptable de répondre à la violence par une violence encore plus aveugle. L’homme interpellé à Thiès a été violemment battu, au point qu’il a fallu l’intervention urgente de la brigade de recherches pour lui sauver la vie. Un tel acharnement, même dirigé contre un présumé coupable, n’est pas seulement inhumain, il est aussi illégal.
La justice populaire ouvre la voie à des dérives incontrôlables : erreurs d’identification, règlements de comptes personnels maquillés en justice, ou simples vengeances collectives. Dans plusieurs villes d’Afrique de l’Ouest, on a vu des innocents brûlés vifs ou tués sous prétexte qu’ils étaient voleurs. Est-ce le modèle de société que nous voulons ? Une société où la justice est sommaire, arbitraire et sans recours ?
La violence citoyenne est un aveu d’échec collectif. Elle signale que les institutions ne remplissent plus leur rôle, mais elle n’apporte aucune solution durable. Au contraire, elle sape les fondements mêmes de la société civile. Il est impératif de renforcer les capacités de nos forces de l’ordre, d’améliorer la réponse judiciaire, et surtout, de restaurer la confiance du public dans le système judiciaire.
Des pays comme le Rwanda ou le Maroc, confrontés à des vagues d’insécurité similaires, ont mis en place des stratégies de sécurité communautaire, associant la population à la prévention sans pour autant déléguer le droit de punir. Ces exemples montrent qu’un équilibre est possible entre vigilance citoyenne et respect des procédures légales.
Nous devons condamner fermement les actes de justice populaire à Thiès, aussi compréhensibles qu’ils puissent paraître sur le moment. La brutalité ne répare rien ; elle engendre seulement plus de chaos. Respecter les lois, même lorsque l’on est confronté à l’injustice ou à l’impatience, est un acte de maturité sociale. Laisser les tribunaux juger, c’est refuser de sombrer dans l’anarchie.
À tous les citoyens : n’éteignez pas la lumière de la justice pour allumer le feu de la vengeance. Résistons à l’appel de la violence facile, et engageons-nous pour un système plus juste, plus efficace, mais toujours humain.
Article opinion écrit par le créateur de contenu : Fodé Ndiaye.
Mis en ligne : 29/07/2025
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