Touba n’est pas épargnée : Le Sénégal a besoin de plus que des arrestations - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - Fait divers | Par Eva | Publié le 19/08/2025 02:08:15

Touba n’est pas épargnée : Le Sénégal a besoin de plus que des arrestations

Les opinions exprimées dans cet article sont celles d’un contributeur externe. NotreContinent.com est une plateforme qui encourage la libre expression, la diversité des opinions et les débats respectueux, conformément à notre charte éditoriale « Sur NotreContinent.com chacun est invité à publier ses idées »

Le récent communiqué sur le dispositif de sécurité déployé à Touba à l’occasion du Grand Magal 2025 met en lumière des chiffres impressionnants : plus de 4 600 agents mobilisés, 526 arrestations dont des trafiquants de drogue et porteurs d’armes, ainsi qu’une importante saisie d’infractions routières. Bien que louable sur le plan de la sécurité, ces arrestations, si elles apparaissent comme une réponse efficace, ne sont en réalité qu’une mesure d’appoint, loin de s’attaquer aux racines profondes du mal.

Touba est une ville sainte, cœur du mouridisme. Elle accueille des pèlerins nombreux et concentre des dynamiques religieuses et sociales intenses. Pourtant, malgré son aura spirituelle, elle n’échappe pas à l’ombre des défis structurels nationaux : chômage élevé, pauvreté persistante, migration interne et pression démographique. Le Sénégal est confronté à une crise économique profonde, caractérisée par une inflation forte, un coût de la vie élevé et un taux de chômage des jeunes élevé des facteurs qui alimentent les vulnérabilités sociales. Des rapports montrent que le chômage, la pauvreté, les inégalités et le manque d’opportunités sont considérés comme des vulnérabilités structurelles susceptibles d’alimenter des conflits ou des trafics illicites.

L’opération policière évoquée dans l’article factuel est évidemment nécessaire pour garantir la sérénité du Magal. Néanmoins, elle est symptomatique d’un réflexe sécuritaire et ponctuel, qui vise à circonscrire des délits visibles plutôt qu’à traiter les causes profondes. Touba, ville sainte, devrait pouvoir être un rempart moral et social. Le fait qu’elle ne résiste pas aux fléaux comme le trafic de drogue ou le port d’armes en dit long sur l’état de la société sénégalaise marquée par une gouvernance défaillante, un système éducatif insuffisant, et des opportunités économiques limitées.

Arrêter 526 individus ne suffit pas à enrayer un trafic ou un phénomène. Sans initiatives durables (formation professionnelle, programmes d’insertion, accompagnement social), ces réseaux renaîtront sans cesse. Le vrai problème est un désœuvrement massif de la jeunesse, la pauvreté persistante, l’essor d’une économie informelle faute d’alternatives viables.

Les guides religieux à Touba sont respectés. Leur parole a du poids. Mais si leur rôle se limite à des exhortations morales, sans programmes concrets d’accompagnement (centres de formation, initiatives entrepreneuriales, sensibilisation active), leur impact reste limité.

Ce qui se passe à Touba est révélateur d’une crise nationale, non d’un incident isolé. Le trafic de drogue au Sénégal, notamment dans des zones comme la Casamance ou même Dakar, illustre des dynamiques transfrontalières et structurelles.

On peut comparer cette situation à celle des villes religieuses dans d’autres pays par exemple la ville sainte de Médine en Arabie saoudite, où la sécurité est renforcée lors du Hajj. Mais seule une gouvernance efficace, des politiques socio-économiques inclusives et des structures de soutien permettent de prévenir les excès et les infiltrations criminelles. Sans ces mesures, les détours criminels persistent, même dans un environnement sacré.

En définitive, cette opération de police à Touba, tout en étant compréhensible, n’est pas à la hauteur de l’enjeu : elle révèle une tendance à privilégier des solutions de surface plutôt que de s’attaquer aux véritables sources du mal chômage, pauvreté, absence d’opportunités, corruption et carence des institutions. Aujourd’hui, Touba n’est pas “épargnée” parce que le Sénégal dans son ensemble demeure vulnérable.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Ousmane Sy.
Mis en ligne : 19/08/2025

La plateforme NOTRECONTINENT.COM permet à tous de diffuser gratuitement et librement les informations et opinions provenant des citoyens. Les particuliers, associations, ONG ou professionnels peuvent créer un compte et publier leurs articles Cliquez-ici.


Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 commentaires

Copyright © 2023 www.notrecontinent.com

To Top