La paix impossible : Quand chacun joue son propre jeu - Notre Continent
> NOTRE CONTINENT > - International | Par Eva | Publié le 21/08/2025 01:08:00

La paix impossible : Quand chacun joue son propre jeu

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Le 20 août 2025, Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, a balayé d’un revers de main les discussions sur les garanties de sécurité pour l’Ukraine, qualifiant d’« utopie » toute négociation sérieuse sans la Russie. Pendant ce temps, les chefs d’état-major de l’OTAN se réunissaient pour évoquer precisely ces garanties, tandis que Donald Trump proposait un soutien militaire aérien à Kiev tout en excluant l’envoi de soldats. Sur le terrain, l’armée russe progressait encore, s’emparant de nouvelles localités.

Derrière les déclarations et les réunions, une réalité s’impose : aucune des parties ne veut vraiment la paix. Chacune attend la victoire de son camp, ou du moins l’épuisement de l’autre. Dans ce jeu dangereux, les Ukrainiens paient le prix fort.

Depuis le début de la guerre en 2022, les tentatives de médiation se heurtent à un mur : la Russie exige une reddition déguisée de l’Ukraine, Kiev réclame le retrait total des troupes russes, et l’OTAN refuse tout compromis qui pourrait être perçu comme une concession à Moscou. Les « garanties de sécurité » promises à l’Ukraine qu’il s’agisse d’un article 5 bis, d’un déploiement militaire ou d’un soutien aérien sont soit irréalistes, soit insuffisantes. La Russie les rejette catégoriquement, les considérant comme une menace directe. Pour Moscou, comme l’a rappelé Lavrov, « discuter sérieusement de garanties de sécurité sans la Russie est une voie qui ne mène nulle part ». Pourtant, la Russie elle-même n’a jamais montré qu’elle était prête à négocier en bonne foi. Les accords de Minsk, signés en 2014 et 2015, n’ont jamais été appliqués, et les pourparlers de paix actuels ne sont qu’un leurre pour gagner du temps tandis que l’armée russe avance.

L’Ukraine, de son côté, ne peut se permettre de céder. Après des années de résistance héroïque, accepter un compromis territorial reviendrait à légitimer l’agression russe et à condamner des millions de citoyens à vivre sous occupation. Mais en refusant toute négociation qui ne passerait pas par un retrait total des troupes russes, Kiev se retrouve dans une impasse : l’Occident promet des armes et des soutiens, mais pas de victoire certaine. Les garanties de sécurité évoquées par les Européens et les Américains comme un soutien aérien ou naval sont des demi-mesures, incapables de contrer la supériorité numérique et logistique de la Russie. Pire, elles risquent de prolonger la guerre sans offrir de issue claire.

L’OTAN, réunie ce 20 août, incarne cette schizophrénie occidentale. L’Alliance multiplie les déclarations de soutien à l’Ukraine, mais ses membres sont divisés sur les moyens à engager. Les États-Unis, sous l’impulsion de Donald Trump, parlent de soutien aérien, mais excluent catégoriquement l’envoi de soldats au sol, laissant aux Européens le soin d’assumer ce fardeau. Or, l’Europe, minée par ses divisions internes et ses dépendances énergétiques passées, peine à parler d’une seule voix. Résultat : les livraisons d’armes sont lentes, les sanctions contre la Russie sont contournées, et l’Ukraine se retrouve seule face à un ennemi déterminé.

La proposition de Trump d’organiser un sommet entre Poutine et Zelensky illustre cette improvisation dangereuse. Le Kremlin n’y voit qu’un piège, ou au mieux une opération de communication. Poutine a bien proposé d’accueillir Zelensky à Moscou, mais dans un contexte où l’Ukraine subit des défaites sur le front. Une rencontre dans ces conditions ne serait qu’une capitulation déguisée. Zelensky l’a compris, qui a refusé l’invitation. Pourtant, sans négociation, la guerre se poursuit, et chaque jour qui passe affaiblit un peu plus l’Ukraine.

Le conflit est devenu une guerre d’usure, où chaque camp mise sur l’épuisement de l’autre. La Russie, malgré les sanctions, tient bon grâce à son économie de guerre et à ses alliés comme la Chine et l’Iran. L’Ukraine, elle, dépend entièrement de l’aide occidentale, qui pourrait se tarir avec les changements politiques notamment aux États-Unis, où l’élection de 2024 a déjà montré les limites du soutien bipartisan à Kiev. Pendant ce temps, les civils paient le prix de cette impasse : villes détruites, familles déchirées, et une génération entière sacrifiée sur l’autel des ambitions géopolitiques.

Cette situation n’est pas sans rappeler d’autres conflits gelés, comme celui de la Corée, où l’absence de paix officielle maintient une tension permanente depuis des décennies. Ou encore la guerre en Syrie, où les puissances étrangères ont prolongé le conflit en soutenant des camps opposés sans jamais chercher une vraie solution. Dans les deux cas, ce sont les populations qui ont souffert le plus, tandis que les acteurs internationaux poursuivaient leurs propres intérêts.

Tant que la Russie refusera de reconnaître l’indépendance et la souveraineté de l’Ukraine, tant que l’Ukraine refusera de céder un pouce de son territoire, et tant que l’OTAN continuera à brandir la menace d’une escalade sans jamais passer à l’action, la paix restera hors de portée. Les garanties de sécurité promises à Kiev ne sont qu’un leurre, une façon pour l’Occident de se donner bonne conscience sans s’engager vraiment. La Russie, elle, ne cherche pas un compromis, mais une victoire ou du moins un statut quo qui lui soit favorable.

Dans ce contexte, les déclarations de Lavrov sonnent comme un aveu : la diplomatie n’est qu’un écran de fumée. La Russie avance sur le terrain, l’Ukraine résiste désespérément, et l’OTAN tergiverse. Le vrai dialogue, celui qui pourrait sauver des vies, n’a jamais eu lieu. Et tant que chacun campera sur ses positions, la guerre continuera, avec son cortège de souffrances et de destructions. La paix en Ukraine ? Une illusion, tant que chacun joue son propre jeu.

Article opinion écrit par le créateur de contenu : Jules Mané.
Mis en ligne : 21/08/2025

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