La sortie du général à la retraite Meïssa Sellé Ndiaye, mettant en garde contre la montée d’un supposé « islam importé » menaçant le modèle confrérique sénégalais, continue de susciter de vives réactions. Parmi les plus virulentes, celle du Rassemblement Islamique du Sénégal (RIS) Alwahda, qui a publié une déclaration dénonçant des propos jugés « d’une extrême gravité ».
Dans un communiqué sans détour, le RIS Alwahda exprime son « indignation profonde » face aux déclarations du général, ancien aide de camp de l’ex-président Macky Sall, tenues lors d’une cérémonie à Koki. Pour l’organisation islamique, ces propos ne sont rien de moins qu’« une vision dangereusement réductrice de l’islam sénégalais » et un risque de « stigmatisation injustifiée » d’une partie de la communauté musulmane.
Le RIS Alwahda rappelle que le Sénégal sort à peine d’une période trouble (2021-2024), marquée par des tensions politiques, des arrestations arbitraires et des accusations de terrorisme ciblant de jeunes citoyens. Dès lors, voir un ancien acteur de la sécurité nationale se positionner aujourd’hui comme gardien de l’orthodoxie religieuse semble, selon le RIS, pour le moins « choquant ».
Plus qu’une simple indignation, le RIS Alwahda interpelle directement la justice. L’organisation demande au procureur de la République de s’autosaisir des propos du général. En cause : des insinuations selon lesquelles certaines associations islamiques seraient liées à des réseaux criminels ou terroristes, accusations formulées sans preuve, selon le communiqué.
« Si le général Meïssa Sellé Ndiaye détient des preuves de tels financements par des réseaux criminels, qu’il les présente devant la justice. Dans le cas contraire, ces accusations doivent être considérées comme des manœuvres diffamatoires et dangereuses pour la stabilité nationale », tranche le RIS.
Au-delà de la polémique autour de la personne du général, c’est le fond du discours qui est pointé. L’usage de l’expression « islam importé » est dénoncé comme étant non seulement « dangereux » et « simpliste », mais aussi historiquement et théologiquement infondé. Le RIS Alwahda rejette toute tentative de hiérarchiser les formes d’expression de l’islam au Sénégal, entre un islam « légitime » parce que localisé, et un autre « illégitime » car perçu comme étranger.
« L’islam est universel, enraciné, et multiple », martèle le communiqué, qui rappelle que le pays a toujours été traversé par une riche diversité de courants, du soufisme aux mouvements réformistes. Ce pluralisme, loin d’être une menace, serait même selon l’organisation « le cœur vivant de notre spiritualité nationale ».
Pour le RIS Alwahda, le véritable danger ne vient pas de la diversité des sensibilités islamiques mais des « discours de suspicion », des « procès en légitimité » et des « instrumentalisations politiciennes de la religion ». L’organisation islamique en appelle à un sursaut républicain fondé sur la justice, le dialogue et le respect mutuel.
Dans un contexte sous tension, alors que les débats sur la place de la religion dans l’espace public se multiplient, cette sortie musclée du RIS Alwahda marque une volonté claire de défendre la légitimité de toutes les expressions religieuses encadrées par la loi. Et rappelle que si vigilance il doit y avoir, elle doit se faire sans stigmatisation ni amalgame.
Article écrit par : Sophie Diop
Mis en ligne : 03/06/2025
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